Prinzhorn Dance School + NLF3
- Post punk tropical
- Le Club
- Production : TP
PRINZHORN DANCE SCHOOL (Brighton, UK)
Prinzhorn Dance School est typiquement le genre de groupe qui pose des problèmes au moment où l'on doit convaincre le public de venir les voir sur scène. Ce duo anglais fait débat, et détient depuis cinq ans le statut paradoxal d'outsider magnifique, que leur nouvel album risque de conforter. Ou pas. C'est tout le mal qu'on leur souhaite : mettre enfin tout le monde d'accord ! PDS a en effet tout pour plaire, avec une équation que les amateurs de rock déviant comprendront sans mal (une énergie minimale punk qui rappelle The Fall + le même matériel et niveau de jeu que ESG + un groove chipé à DEVO et Shellac). Mais le groupe pose problème quand il faut expliquer pourquoi on est super fan. La magie, ça ne s'explique pas. Il faut dire que quand le super label DFA a sortit en 2007 le premier album de Prinzhorn Dance School, ça nous a forcément un peu guidé l'écoute. L'oreille intensivement moulée depuis plusieurs années par The Rapture, LCD Soundsystem, Gavin Russom ou The Juan MacLean, nous avions tout naturellement associé ce duo anglais très minimal (une basse, une batterie et un double chant mixte) à une nouvelle façon de danser. Et puis, si James Murphy avait décidé de les signer, c'est qu'il y avait forcément un truc qui tournait autour de ça, à un moment ou à un autre. Mais c'était vite oublier que le leader de LCD Soundsystem était surtout un grand fan du rock sec de The Fall et du groove dingue de son furieux frontman Mark E.Smith. Malgré tout, Prinzhorn Dance School (Tobin et Suzy, frère et soeur dans le civil) n'ont pas goûté à la reconnaissance mondiale qu'ils méritent, et sont restés cantonnés au statut de mini-stars underground, adulés par certains, détestés par d'autres... La faute à leur patronyme bizarre emprunté au célèbre psychiatre et historien d’art allemand Hans Prinzhorn (auteur du livre "Expressions de la Folie" (1922), fameuse étude de travaux réalisés par des patients en psychiatrie) ? La faute à leur minimalisme absolu qui ronge le post punk-funk sur l'os ? La faute à leur réelle singularité qui fait qu'on n'arrive pas à les ranger dans une case ? A leur spontanéité et l'aspect surprenant de leur musique ? Non. Prinzhorn Dance School est juste un groupe sauvage qui demande à être apprivoisé. Leur nouvel album, toujours aussi sauvage mais beaucoup plus chaud dans le son, devrait d'ailleurs rallier aujourd'hui à sa cause de nouveaux fidèles. N'attendez pas que Prinzhorn Dance School devienne dans 20 ans un groupe mythique (ce qui leur pend au nez) : venez les voir en chair et en os, foi de grand fan subjectif, vous ne le regretterez pas ! (FL)
NLF3 (Paris, Fr.)
NLF3, à l'instar de Prinzhorn Dance School, fait également figure d'outsider magnifique. Adulé par une petite armée de fan aux quatre coins du monde, le groupe issu des flamboyants Prohibition construit en effet depuis plus dix ans une oeuvre qui n'a rien à envier à des super stars comme Tortoise, Battles ou Gang Gang Dance, mais est confronté à cet idiot adage qui veut que nul ne soit prophète en son pays. NLF3 ne s'inscrit en effet pas dans une tradition Française connue, mais dessine un folklore nouveau, nourri d'expériences et d'influences variées rencontrées loin des balises. Les textures de Sonic Youth, le groove de Fela, le minimalisme de Steve Reich, les envolées Morriconiennes, la folie Tropicaliste, les expérimentations d'Aphex Twin ou This Heat, autant de chemins de traverse qui font se rencontrer l'afro beat, le post-rock, la transe et le kraut cosmique sur leurs albums complètement hors du temps, et donc toujours d'actualité : encore un groupe unique en son genre. Cinq albums donc, et ce magnifique nouveau EP "Beast Me", dans lesquels le trio de multi instrumentistes (très doués) a su dompter les opposés, arrivant avec une fluidité palpitante à concilier chaud et froid, danse et méditation, acoustique et électronique, noise et mélodies presque enfantines, grands espaces et puissance frontale. Malins (et surtout très talentueux), le groupe a réussi, sous ses faux airs de power trio (guitare-clavier/basse/batterie), à trouver le point commun de toutes ses influences, offrant une musique directe et évidente, qui ne cherche ni à impressionner par sa technique, ni à compliquer les choses pour le plaisir. NLF3 cherche vraiment la transe et le partage, et, c'est con à dire mais c'est vrai, ça se sent tout de suite quand des musiciens sont contents de jouer, ensemble, et pour les autres. Une musique pleine d'images et d'histoires qui sollicite le corps (ils ne font pas semblant quand ils jouent) et lave la tête. Depuis leur premier album en 2000, et avec un train d'avance sur tout le monde, NLF3 n'a cessé de jouer avec les formes dont se nourrit la pop d'aujourd'hui, avec classe et humilité : et si 2012 faisait enfin mentir l'idiot adage ? Vive NLF3 ! (FL)